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03/04/2017

Cabinet portrait

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Lorsque je suis arrivée dans ce musée de province, je me m'attendais pas à voir ce portrait.

La dernière fois que j'avais vu cette femme, j'avais cinq ans.
Elle partait me laissant à mon père.

Elle n'est jamais revenue.
Le temps a passé et je l'ai oubliée.
Je me suis mariée, j'ai eu des enfants puis des petits-enfants.
Ma vie était plutôt heureuse.
Bon, j'avais bien ce petit point au cœur parfois mais qui ne cache pas une blessure ?

A la revoir dans ce musée, j'ai d'abord reconnu ses yeux.
Elle avait changé, elle ne portait plus ses éternelles jupes plissées et elle avait le sourire.

J'ai regardé la signature du peintre.
C'était lui !
Celui qui m'avait pris ma mère !

Je suis sortie.
Je me suis aperçue que cette femme ne représentait plus rien pour moi...  

27/03/2017

Le mur.

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Je suis né dans un pays où le travail est rare et la misère courante.

Peu importe le lieu de ma naissance, nous sommes nombreux à vouloir fuir la misère ou la guerre.
Comme beaucoup, j'ai cru arriver dans un pays de Cocagne.
C'était un rêve, ceux qui en étaient revenus les poches vides me l'avaient dit.

Après un long périple je suis arrivé en Californie.
J'étais sûr de pouvoir travailler.
Sur un chantier, faire la plonge, accepter n'importe quel travail.

Je ne connais pas bien la politique de ce pays.
Je sais seulement qu'ils ont élu un président qui n'aime pas les étrangers, Trump.
Il veut rendre l'Amérique aux Américains, je ris jaune, l'Amérique n'est peuplée que de gens venus d'ailleurs.

Aujourd'hui j'ai peur, je rase les murs ou je prends un air faussement décontracté et je regarde passer les gens.

J'avais pensé à la France mais on prépare aussi des élections.
Une femme a le vent en poupe qui, elle aussi, veut chasser les étrangers.
Pourtant, là aussi, je veux bien travailler dans un restaurant.
Je sais que dans les cuisines, là-bas, ça parle toutes les langues.

Je veux devenir un peintre, le peintre de la misère.
Je sais que je n'aurai aucun problème pour trouver des modèles...

13/03/2017

Printemps...

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Voilà...
La fenêtre est ouverte, j'ai cueilli les premiers narcisses.
J'ai regardé par la fenêtre, le seul arbre du minuscule jardin a passé l'hiver sans souci.

Samedi, je suis allée au Bon Marché, j'ai vu une ravissante marinière.
Au bar, le blond des jeunes femmes était certifié "artiste capillaire".
Les sacs étaient presque tous signés et les bébés ne pleuraient pas.
J'ai oublié le temps à la librairie où les canapés sont toujours accueillants et les livres d'art tentants.

Dans ce quartier, les femmes âgées ont toutes de la discipline.
Alors elles marchent la tête haute malgré la canne.
J'ai eu envie de printemps ailleurs.
De respirer l'air de la mer.
D'entendre le cri des mouettes.
De marcher dans l'eau.

Il suffit parfois d'un rien pour se retrouver ailleurs.
Par la grâce de cette marinière, j'ai fermé les oreilles, ai oublié Paris, ai retrouvé mes dix ans.
J'étais de nouveau avec ma pelle et mon seau, ramassant des coques qui n'étaient pas encore impropres à la consommation...
 

19/12/2016

Regardez le collier.

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Vous voyez ma bouche ?
Elle est belle.
Vous voyez ma peau ?
Elle aussi est faite pour attirer le baiser.

Vous ne connaissez pas mon mari.
Le jour où il m'a offert ce collier, il était encore très amoureux.
J'avais de la chance car l'époque n'était pas à l'amour conjugal.
Les femmes enfantaient et souvent mouraient en couches.
L'homme lui, allait chercher son plaisir ailleurs.

Il était si fier de moi qu'il a fait faire ce portrait.
Je suis belle pour l'éternité...

Puis le temps a passé.
Mes rondeurs charmantes sont devenues de la graisse.
Je lui ai refusé ma couche de peur d'une nouvelle grossesse.
J'avais six enfants vivants mais combien d'enfants mort-nés ?
Combien d'enfançons sont nés, ne vivant que quelques heures ?

Ce collier est le dernier cadeau reçu.
Je suis devenue une matrone régnant sur sa demeure.
Il est devenu un mari absent.

Ce collier me présente comme une femme heureuse.
Et il m'arrive de regarder le tableau et de pleurer...

 

28/11/2016

T'en souviens tu ?

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Regarde ! La petite épicerie de notre enfance est fermée.
Tu crois qu'elle est morte ?

Tu dis qu'elle était vieille mais lorsque nous étions petits tous les grands nous semblaient vieux.

Oui, je sais, elle n'avait pas le genre du coin...
Je crois me rappeler qu'elle venait d'Espagne ou du Portugal.
Tu te souviens de son accent ?
Et ces sacs de jute remplis de haricots, de lentilles, de noix ou de riz ?
On devait se servir avec la "petite pelle", on en prenait toujours trop.

Elle vendait aussi du jambon, un peu de fromage, des œufs, c'était pratique pour maman.
Et puis quelquefois maman nous faisait redescendre, on détestait ça.
On descendait toujours toutes les deux car Danièle ne voulait jamais venir avec nous.
Elle habillait ses poupées ou lisait dans son coin et elle profitait de notre absence pour se plaindre de nous...

Parfois il restait un peu de monnaie alors on courait à la boulangerie s'acheter quelques bonbons.
Chaque fois, on espérait qu'elle ne s'apercevrait de rien.
Maman nous menaçait de tout raconter à papa.
Nous n'étions pas malignes ! Arriver à la maison en sentant le carambar...

P
ersonne n'a jamais repris cette épicerie...