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Hier soir, l'Ours téléphone et, de la fierté dans la voix, annonce que P'tite Sœur sait faire du vélo.

J'exprime ma joie et derrière j'entends la douce voix de ma petite fille en train de râler.
Elle accuse son père de ne pas savoir garder un secret.

Je demande donc à l'Ours le pourquoi de la chose car c'est bien de savoir faire du vélo.
Il m'apprend que P'tite sœur voulait nous annoncer la chose elle même, dimanche.

En grand'mère inventive, je dis à l'Ours "tu peux lui dire que nous sommes sourds, que nous n'avons rien entendu et que c'est pour ça que tu as parlé de vélo".

Il me passe P'tite Sœur qui m'explose les tympans en m'annonçant d'une voix à casser les carreaux "Je sais faire du vélo ! " puis elle demande à parler à Papy.
En plus d'être sourd, on doit être mal comprenant...
J'ai entendu la douce voix de la petite dernière depuis ma place, à l'autre bout du séjour.

J'espère que dimanche, elle aura oublié notre surdité...

C'est le devoir à trois points de vue...

- Pourquoi suis je venue voir ce film immoral avec mes filles ? Cette histoire d'adultère, cette fille qui marche pieds nus et n'a aucune tenue.

- J'espère que Pierre est bien parti signer un contrat, on n'est jamais trop prudente, j'aurais dû partir avec lui.

- Elle est belle cette actrice, j'ai le même nez qu'elle, j'ai bien fait d'avoir recours à la chirurgie, il suffit de regarder ma mère et ma sœur.

- Je me demande si le dîner sera réussi ce soir, on ne sait toujours pas si Pierre sera rentré, j'espère que Pauline ne regrettera pas son mariage trop rapide.

- J'espère que Pierre ne  rentrera que demain, Père et Mère vont encore le questionner sans fin, sur ses études, ses parents, je l'aime ça devrait leur suffire.

- Comme je suis heureuse d'être libre, de n'avoir aucune obligation sauf ce fichu dîner où on va encore me présenter un jeune homme sans intérêt.

- Il est long ce film, elle n'en finit pas de s'éteindre, la gourgandine...

_ Il est long ce film, qu'on en finisse, elle devait mourir, elle avait volé le mari d'une autre.

- Il est long ce film, j'ai envie d'une cigarette et ma mère en ferait une maladie.

- Les filles ! Vous n'avez pas envie de rentrer, ça traîne en longueur.

On n'échappe pas au vieillissement, sauf à mourir jeune ou de façon délibérée.

On vieillit insidieusement, par petites touches.
La première fois où on vous cède la place dans le bus, on se demande pourquoi...

On prend un autre coup de vieux lorsqu'on décide de laisser à ses cheveux leur couleur naturelle.
Pour ce qui me concerne, c'est gris avec une mèche blanche qui ressort.

On devient transparent.
Les jeunes qui sortent du collège vous rentrent dedans.
Les autres, accrochés à leur portable, vous bousculent sans s'arrêter.
Ni les uns ni les autres ne vous ont vue...

Vous avez pris l'habitude de ne pas vous regarder dans la glace.
Simplement un peu de parfum après la toilette, un peu rouge à lèvres et c'est tout.

Mais là où ça ne va plus du tout c'est quand le décalage entre votre carte d'identité et votre "moi profond" vous frappe.
A cause de l'âge que vous avez dans la tête, certains jours, la jeune femme que vous êtes ne se reconnaît pas dans ce corps de "senior".

Je déteste le mot.
Je ne suis pas "senior" !
Je suis une jeune femme coincée dans un corps de moins jeune...

La maîtresse est partie en vacances, même pas en Auvergne.
Elle nous a laissé un thé à la menthe et débrouillez vous !

Déjà ce matin, au lieu d'écrire un devoir, je suis allée faire une prise de sang qui m'avait été prescrite avant que j'aille enterrer tous ces morts.

Prise de sang du lundi dit attente.
Attente veut dire absence de petit déjeuner au lever.

Je pense à la maîtresse allongée sur un transat, buvant son thé à petites gorgées pendant que ses élèves vont au labo, au boulot, au dodo.
Oui certains doivent travailler la nuit alors ils vont au dodo le matin.

Ce devoir n'a ni queue, ni tête mais ce n'est pas grave.

Ceci n'est pas un devoir.

Hier, c'était la Saint Valentin.
Surtout, il faisait beau !
Alors, nous sommes partis en vadrouille vers les Ternes.
On est passé devant chez Darty. Je me suis rappelée que je voulais un mixer pour passer la soupe.
Le même mixer que celui de ma sœur.
Le Goût l'a acheté.
Non, non, ne vous détournez pas d'un air dégoûté, ce n'est pas un cadeau de Saint Valentin !
Je ne sais pas du tout quand ce mixer servira.
Il fait beau et doux donc ce n'est pas un temps à soupe...
Nous avons descendu la rue Poncelet et j'avais des envies de tulipes.
Les fleuristes avaient évidemment multiplié leur prix par deux au début de la rue.
Chacun des fleuristes suivants avait ajouté un coefficient au prix du fleuriste précédent.
A être trop gourmands ils perdent et la foule ne se presse pas dans leur boutique.

Le Goût a quand même acheté des tulipes roses, elles se tiennent au garde à vous et ne sentent que le pétrole.
J'aime de moins en moins les fleurs coupées.
Elles sont tellement traitées qu'elles se suicident avant de perdre leurs pétales.

Etonnant, non ?