heure-bleue

Chaque soir, l'homme, Balagan et moi nous lisons, pas Balagan sauf si le livre vient de chez l'Ours, elle s'approprie l'objet. Chaque soir, l'homme lit deux pages et m'annonce qu'il dort, et effectivement à peine la phrase prononcée, il dort.

Et moi je lis, enfin je crois que je lis. A minuit, ma lampe a réveillé l'homme, il n'a rien dit, s'est tourné et s'est rendormi, à deux heures ce matin, l'homme s'est réveillé pour satisfaire un besoin naturel, il a décidé d'éteindre ma lumière..

Et comme tous les nuits, j'ai râlé : "Pourquoi, tu m'éteins ma lampe, tu vois bien que je lis !"

Et ce manège dure depuis des années, ...

Avant, on se mariait pour faire des enfants, ne pas disperser les biens, les femmes restaient à la maison, mouraient en couche ou d'épuisement, le mari en reprenait une plus jeune et le cycle infernal recommençait.

Beaucoup plus tard, on a inventé le mariage d'amour, je ne sais plus qui a écrit : "l'Amour dure trois ans", c'est pas l'amour qui dure trois ans, c'est l'élan qui fait que chaque rencontre se termine dans un lit ou ailleurs selon l'urgence.

Ensuite, l'enfant s'annonce, les emmerdements aussi, si on a la chance de se rencontrer jeune, on grandit ensemble et le couple dure avec des ajustements, chacun défend ce qui compte le plus pour lui.

Dans la vie de tous les jours, votre conjoint vous agace souvent pour des détails sans importance, le tube de dentifrice jamais rebouché, les chaussettes jetées à côté du panier, l'homme qui attend sa femme, pour passer à table, pour aller voir une exposition à Bruxelles et trouve le musée fermé, pour aller à la banque se faire engueuler parce que le découvert atteint des sommets et que cette dernière, lâche comme pas deux, demande : "Ca t'ennuie pas Minou si je t'attends au café ?".

C'est ça un couple, un vrai, on vieillit, on tombe malade et l'autre tient la main, on arrive même à rire du pire, et le pire n'est jamais absent d'une vie.

Je ne sais pas pourquoi, j'écris ça ce matin, peut être parce que l'homme hier avait décidé de rester tranquille à la maison pour écouter son coffret "les orgues historiques", un truc qui me fait bondir, on dirait des chats dont la queue est coincée dans une porte.

Et ce matin, il a décidé de venir garder la Merveille avec moi, à lui les couches sales, et la promenade au jardin des Batignolles...

Notre Président honni n'aime pas qu'on dise du mal de lui sur la toile.
S'il osait, il ferait comme les Chinois, il fermerait les blogs qui ne l'aiment pas. Il fermerait donc presque tous les blogs qui parlent de lui !

Je n'avais pas envie d'écrire sur lui, sur son côté camelot qui me fait presque regretter ce vieux brigand de Chirac, au moins ce vieux brigand avait de la prestance.
Je n'avais pas envie de montrer son côté infantile, on lui a quand même confié la possibilité d'utiliser l'arme nucléaire.
Je n'avais pas envie de parler de ce petit homme qui ne sait pas résister à la vanité et qui fait admirer à tous les journalistes sa montre.
Je n'avais pas envie de répeter ce qu'il dit en petit comité : "Je veux faire du fric !".
Je n'avais pas envie de parler de la lâcheté des journalistes qui sont au garde-à-vous, le petit doigt sur la couture du pantalon.
Je n'avais pas envie de voir Khadifi à la télé hier soir, les cheveux teints, et se foutant de notre pays alors que le pays a baissé son pantalon devant un dictateur.
Je n'avais pas envie de parler de cette fausse baisse du chômage, le Baby Boom part à la retraite, on les pousse, et je n'appelle pas emplois, ses créations de postes qui ne permettent même pas au salarié de louer une chambre de bonne, de ces chambres de bonnes qui ont été transformées en studio onéreux.
Je n'avais pas envie mais j'ai horreur des interdictions. Je n'aime pas la société que nous propose ce petit homme, je n'aime pas voir se pavaner en Rolls, Monsieur de Margerie qui se frotte les mains de satisfaction, en parlant d'un baril à 200 dollars dans un mois.

Et surtout je n'aime pas qu'on me dicte ma conduite.

Il est interdit d'interdire !!!

Je suis une grand mère heureuse mais fatiguée. Le mot favori de la Merveille est "non", elle le répète trois fois pour être certaine d'être comprise, le mot que j'utilise le plus est "non" suivi d'une intervention rapide pour empêcher une bêtise.

Hier, le sieste a été courte, je n'ai même pas pu lire le Libé de l'Homme.
Le reste de la journée a été animé:
- Non, tu ne caresses pas le cygne, le cygne mord les petites filles, les grandes aussi
- Non, tu ne vas pas mendier la salade de pates de la dame assise à côté.
- Non, tu ne vas pas embrasser le bébé tout neuf.

A l'appartement, le non continue:
- Non, tu ne manges pas le chocolat de papa
- non, tu ne manges pas le quatre quart
- non, tu ne rentres pas dans la cuisine
- non, tu ne touches pas à l'ordinateur de Papa
- Attention, tu vas tomber !
- Jeanne ça suffit !
- Si ! Tu dois manger tout !
- Si ! Tu dois accepter que ton grand'père te change ta couche, tu ne sens pas bon !

Hier soir, nous avons dîné, à 22 heures j'étais au lit et je crois bien que je dormais à peine la tête posée sur l'oreiller.

Mais rien ne fait plus plaisir qu'un câlin, qu'un bisou un peu mouillé, une peau douce contre la vôtre.

Rien n'est plus drôle qu'une petite fille qui ressemblait à une pub et qui le soir garde les traces du menu sur sa jolie blouse et qui malgré nos soins à des mains et des pieds noirs comme des boulets Bernot.

Alors, lorsque l'homme me demande à 8 heures ce matin : "On fait quoi aujourd'hui", j'ai envie de le mordre...

La Merveille grandit, elle prend de l'assurance, elle veut boire toute seule, être assise comme une grande.

Elle veut être servie comme une princesse, si le service est lent, vous avez droit à la Jeanne aux yeux noirs !

J'aime autant vous dire que la Merveille, qui n'a d'ailleurs pas les yeux noirs, n'arrivent qu'à nous faire rire.

Vous avez vu, il faitbeau aujourd'hui, je vais pouvoir aller admirer les 3 petits canetons, non Karmara, ils ne sont pas de la petite cane blanche...